FNAEG : Histoire d’un fichier

Il aura fallu l’arrestation du tueur en série Guy Georges pour que la France et les équipes d’enquêteurs se dotent d’un outil efficace regroupant les empreintes génétiques des délinquants. Retour sur la création du désormais célèbre Fnaeg et ses nombreuses évolutions.

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Au printemps 2023, le Fichier national automatisé des empreintes génétiques (Fnaeg) soufflera ses vingt-cinq bou­gies. Installé à l’Institut national de police scientifique (INPS) d’Écully, près de Lyon, le Fnaeg fonctionne 24h/24 toute l’année, comparant automatiquement en permanence les nouveaux profils insérés (ADN d’une personne ou trace génétique isolée par un laboratoire au cours d’une enquête) avec les mil­lions de profils déjà contenus dans le fichier. Si l’outil est aujourd’hui incontournable dans la plupart des affaires judiciaires, c’est la traque du tueur en série Guy Georges qui a poussé la France à voter sa création en juin 1998, non sans crainte d’un fichage génétique de masse, pour le meilleur ou pour le pire. Récit d’une mise en route compliquée…

Avant la création du Fnaeg, l’exploitation de l’ADN dans les enquêtes criminelles existait déjà ponctuellement, mais les profils génétiques n’étant pas centralisés, les comparaisons s’avéraient très compliquées et impar­faites. « Les prélèvements ADN effectués sur une scène d’infraction étaient envoyés dans des laboratoires publics ou privés qui, ne disposant d’aucune base de données nationale, pouvaient uniquement faire des comparaisons directes, c’est-à-dire entre l’ADN du suspect et la trace relevée, explique Magali Rapuzzi, secrétaire zonale adjointe Sud de la police technique et scientifique (PTS). Si l’ADN sur la scène n’était pas le même que celui de la personne, ça ne faisait pas avan­cer l’enquête d’un iota. » Et puis, dans les années 1990, la capi­tale est secouée par une série de viols et d’assassinats commis tantôt dans des parkings, tantôt dans des appar­tements. Pascale Escarfail, Catherine Rocher, Elsa Benady… A Paris, les jeunes filles sont terrorisées, dans le métro des affiches fleurissent les sommant de se faire raccompagner la nuit, les enquêteurs de la brigade cri­minelle sont dépassés par celui que dorénavant tous les médias surnom­ment « le tueur de l’Est parisien ». « À l’époque, les policiers ne parviennent pas à lier les affaires entre elles. Et pour cause : au 36, les assassinats dans les parkings et ceux perpétrés dans les appartements sont confiés à deux groupes d’enquêtes distincts », précise Magali Rapuzzi.

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En décembre 1994, à l’occasion du meurtre d’Agnès Nijkamp, une Hollandaise de 32 ans assassinée à son domicile près de Bastille, les enquêteurs retrouvent une trace de sperme. L’ADN du tueur est enfin prélevé. Mais aucun fichier permet­tant de comparer cette empreinte génétique n’existe. Il faudra attendre le printemps 1995 pour que de la salive soit retrouvée sur un mégot de cigarette dans l’appartement d’Élisabeth Ortega, seule victime à lui avoir échappé. Il s’agit du même code génétique que celui prélevé chez Agnès Nijkamp. L’ADN est baptisé « SK1 », pour « serial kil­Ier numéro 1 ». Quelques mois plus tard, il est aussi retrouvé chez Hélène Frinking, découverte morte dans son appartement du 10e arrondis­sement le 8 juillet 1995. A l’automne 1997, les cadavres de Magali Sirotti, assassinée dans son appartement du 19e arrondissement ainsi que celui d’Estelle Magd, morte à son domi­cile dans le 11e arrondissement, sont retrouvés l’un après l’autre. Mais que fait donc la police ?

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