Maladresse. Boulette. Erreur. Appelez cela comme vous voulez, mais la conséquence est un bon gros scandale politique.
En Argentine, il y avait Maradona et le tango, il y a dorénavant la liste des agents secrets en accès libre sur le Net. La presse de tout le pays en a fait les gros titres en septembre dernier : un registre manuscrit (!) de 272 pages a filtré sur les réseaux sociaux. Intitulé « Livre de protocole de résolutions », il émane de l’AFI, l’Agence fédérale d’investigation, l’équivalent de la DGSE et il contient pas moins de 3 850 décisions officielles concernant les services extérieurs. Le quotidien Clarín, comme la plupart des journaux, publie des extraits de ce document qui révèle l’identité de près d’un millier
d’agents secrets. Outre leur nom réel, on y trouve leur numéro de carte d’identité, adresse, mutations, congés, arrêts maladie, et même leurs notes de frais… Toute l’activité d’une grande partie du service entre 2016 et 2018 se retrouve en ligne.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, cette fuite n’est pas du fait de hackers mal intentionnés, d’activistes à la solde d’un pays ennemi ou de lanceurs d’alertes souhaitant dénoncer une situation. Non, la faute incombe à deux juges d’instructions peu au fait des nouvelles technologies, ou trop naïfs… Cette incroyable bévue a pour origine un procès intenté à l’AFI, accusée d’avoir espionné l’opposition, la presse, les syndicats et l’Église
catholique sous la présidence de Mauricio Macri (2015-2019). Chargé d’instruire plusieurs plaintes, un magistrat de Lomas de Zamora, ville de la banlieue de Buenos Aires, demande la déclassification de certains documents. Celle-ci lui est accordée, à condition que la copie de ceux-ci ne soit consultable que dans une pièce du palais de justice. Mais le Covid est passé par là et face à la situation sanitaire et au confinement strict en Argentine, il décide de les faire scanner et de les mettre sur un serveur accessible via mot de passe aux parties civiles. Elles sont quatre-vingts… Et l’info se retrouve dans tous les médias. Étonnant, non ?
Alibi #4 : Au cœur des prisons
Un grand dossier consacré aux prisons et notre cahier de près de 70 chroniques en guise de dessert viennent compléter le menu.